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Fedor Chaliapine, le collectionneur Sava Mamontov, les peintres Boris Koustodiev, Mikhaïl Larionov,
              et Natalia Gontcharova, ...

              A partir de 1911, Pavel Petrovitch utilisa tantôt le pseudonyme Mak, tantôt son prénom dans son
              orthographe française, soit “Paul”! En 1915, il adopta définitivement le pseudonyme Mak.
              De ma vie je n’ai entendu mon père être appelé Pavel. Dans son entourage, tous ceux qui parlaient
              de lui ou s’adressaient à lui, utilisaient indifféremment la dénomination Paul ou Mak. Et c’est avec
              raison que Piotr Annenkov intitula son article in memoriam “Khoudojnik-Miniatourist Pol Mak.” (le
              peintre miniaturiste Paul Mak)

              Entre 1911 et 1916, Mak occupa à Moscou la fonction de décorateur dans le théâtre Mariia
              Artsybusheva, un “théâtre miniature”, également appelé, du fait de sa situation, Théâtre Mamo-
              novskii (actuellement à un jet de pierre de la place Pouchkine).

              Entre 1912 et 1913, il fréquenta pendant une dizaine de mois l’atelier du peintre moscovite Kon-
              stantin F. Youon. Au cours du printemps 1913, il exposa des portraits dans la galerie Lemercier.

              Le début de la carrière artistique de Mak coïncida avec l’avènement de l’Avant-Garde russe (1910).
              Si Mak a bien connu et fréquenté Mikhaïl Larionov et Nathalia Gontcharova, dont les noms sont
              indissolublement liés au néo-primitivisme, au rayonnisme et au futurisme russe, il n’a jamais fait
              que côtoyer les avant-gardistes. Etant donné son tempérament, sa distinction et sa sensibilité, il fut
              naturellement attiré par les idéaux des artistes qui s’étaient groupés à la fin du XIXe siècle autour
              de la rédaction de la revue artistique saint-pétersbourgeoise Le Monde de l’Art. Firent partie de ce
              mouvement qui défendait “l’art pour l’art”: Mikhaïl Vroubel, Alexandre Benois, Eugène Lanceray,
              Leon Bakst, Ivan Bilibine, Mstislav Doboujinski, Konstantin Somov, ... Comme l’a écrit, à leur propos,
              Valéri Fateïev dans Le fantastique et l’imaginaire dans la peinture russe (Editions Aurora 1989): “[…]
              accordant une grande importance à la maîtrise professionnelle, à la qualité de la conception et de
              l’exécution, ils s’adressaient à l’héritage du passé. Dans leurs travaux, ils s’efforcèrent d’exprimer
              l’atmosphère qui les entourait, leurs propres sentiments et pressentiments […] Le Monde de l’Art
              qui opposait la liberté de la création artistique au positivisme petit-bourgeois […] était très proche
              du symbolisme. […] La stylisation fut un procédé appliqué communément par tous ses membres
              […]” Ce goût pour la stylisation résulta, en partie, de la diffusion des œuvres graphiques d’artistes
              occidentaux tels que le préraphaélite Burne-Jones et le “décadent” Aubrey Beardsley.


              A partir de 1913 Mak se passionna pour le tango! Il est amusant de constater que la première publi-
              cation de haut niveau lui accordant une place non négligeable vient des Etats-Unis et concerne sa
                                                     carrière de danseur de tango: il s’agit du Vol-2 EXPERIMENT
                                                     1996, ouvrage remarquable édité sous l’autorité du profes-
                                                     seur John Bowlt pour “The Institute of Modern Russian
                                                     Culture” de l’Université de Los Angeles.
                                                     Terriblement instructifs, les chapitres concernant le tango
                                                     et Mak!... Ils m’ont permis de mieux appréhender l’origine
                                                     de cette “gestuelle” si particulière à mon père, gestuelle
                                                     où se mêlaient fougue, prestance et maniérisme, et qui ne
                                                     fut pas pour rien dans la fascination que ce grand séduc-
                                                     teur exerça, toute sa vie durant, sur bien des femmes et
                                                     des hommes! Il y avait dans son maintien et ses mouve-
                                                     ments une véritable élégance féline, une élégance dont
                                                     je ne l’ai jamais vu se départir et que l’on retrouve dans
                                                     ses œuvres chez tous les personnages masculins, depuis
                                                     les “Tamerlan”, “Persée”, “Tristan”, “Don Quichotte” et
                                                     autres héros légendaires jusqu’aux vieux faunes auxquels,
                                                     avec l’âge, il se plut à donner des rôles de tendre grand-
                                                     père.

                                                     En février 1916, en pleine guerre et alors que la situation
                                                     sur le front russe n’est guère des plus favorables, Mak
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