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sonnes suivirent son cercueil recouvert du drapeau blanc, bleu et rouge. Emilie Mastovoï partit
              rejoindre à Montréal ses deux enfants qui s’y trouvaient depuis vingt ans. Elle emporta dans des
              conditions discutables un grand nombre de tableaux. Elle ne survécut pas longtemps à mon père.

              Il est étrange que Paul Mak, dont la personnalité et les multiples talents n’ont jamais laissé indiffé-
              rents ceux qui l’ont côtoyé et dont de nombreuses œuvres ont suscité et suscitent encore étonne-
              ment et admiration, soit à ce point passé sous silence dans les livres d’art.
              Il est vrai que cet homme fut dans sa vie privée un grand séducteur et dans son métier, un grand
              solitaire. Dès 1934, il quitta même le circuit du marché de l’art, dont il considérait les promoteurs
              comme des “marchands du temple”, et fit toutes ses expositions à compte d’auteur.
              Comme il avait l’âme d’un joueur, il mena une vie aventureuse, se soucia peu du lendemain et ne
              prit jamais le temps de rentabiliser son talent.


              Quantité d’informations sont encore à exhumer dans les pays où il a séjourné: la Russie, l’Iran,
              l’Egypte, la Grèce, la France, l’Angleterre et la Belgique. En ce qui concerne les quatre premiers pays
              cités, ce n’est guère facile étant donné les grands bouleversements politiques qui s’y sont produits.

              Le style Mak est toujours reconnaissable, quels que soient les thèmes abordés et les époques, qu’il
              s’agisse de dessins, d’aquarelles, de gouaches ou de peintures à l’huile, ou encore de miniatures ou
              de portraits grandeur nature. Il n’y a qu’à voir la légèreté et l’agilité du coup de pinceau, la rigueur
              de la composition, l’harmonie des couleurs, la vie intense qui anime les personnages et l’élégance
              “aristocratique” des attitudes, et ce tant chez les animaux que chez les êtres humains... Mak intégra
              à l’art de la miniature persane la tradition de l’icône russe faite de couleurs et de sacré, les aspira-
              tions préraphaélites et l’esthétique symboliste.
              Ses œuvres, quel qu’en soit le style ou le thème, frappent presque toujours par la qualité de leur
              architecture.

              Il y aurait beaucoup à dire au sujet de sa signature. Elle a évolué au cours du temps ; elle est diffé-
              rente selon qu’il s’agit d’un dessin, d’une miniature
              ou d’une peinture à l’huile. Par exemple, la signa-
              ture en lettres majuscules, déjà utilisée en Russie et
              dont le graphisme ramène à Beardsley, est typique
              des œuvres exécutées à Téhéran entre 1923 et
              1925. A partir de 1926, pour les gouaches en style
              miniature, Mak adoptera et conservera jusqu’à la
              fin de sa vie la signature en arabesque.


              En fin de compte, cet homme fascinant que fut
              Mak, eut trois pôles d’attraction dans la vie: son
              art, les femmes et les courses de chevaux. Son tem-
              pérament de joueur et son amour des chevaux le
              me nèrent plus d’une fois à la ruine. Les femmes
              qu’il a connues ont souvent gardé de lui un souve-
              nir impérissable. De son vivant, son talent d’artiste
              peintre ne lui a apporté qu’une gloire éphémère.

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              Dimitri P. Dourdine Mak
              E-mail: dourdine.mak@skynet.be
              Site: www.dourdine-mak.be
                                                   Paul Mak 1915
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