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s’engagea comme volontaire dans l’Ecole militaire
d’infanterie Grand Duc Constantin Constantinovitch à
Kiev ; après 4 mois de cours accélérés, il fut envoyé au
front. Incorporé dans le 89ème régiment d’infanterie
Bielomorsky, il participa à la dernière grande offen-
sive contre les Allemands, sous le haut commande-
ment du général Alexis Alexéiévitch Broussilov. Il fut
grièvement blessé: une balle lui brisa le fémur droit. Il
évita l’amputation mais garda une jambe plus courte
de quelques centimètres. Il termina la guerre avec le
grade de capitaine. Au total, sa bravoure lui valut six
blessures et plusieurs distinctions militaires dont la
prestigieuse Croix de St Georges (quatrième rang).
En octobre 1917 survint le coup d’état bolchevique
orchestré par Lénine. Mak, qui, tout en marchant
avec des béquilles, arborait de façon ostentatoire son
uniforme et ses décorations, fut arrêté et enfermé
dans la prison de la Boutirka: condamné à mort, il y
séjourna pendant plusieurs mois. Pour tuer le temps,
il dessinait. Il fut amené ainsi à exécuter le portrait
Caricature de Serge Rachmaninov. de ses geôliers. Ceux-ci, émerveillés par son talent, le
© libérèrent.
En 1921, ne supportant ni le régime bolchevique ni les conditions de vie qui régnaient à Moscou, Mak
décida de quitter son pays. Accompagné de son épouse Hélène Kourbskaya, il fuit par le sud. Après
une longue et périlleuse randonnée à cheval à travers l’Ukraine puis le Turkménistan, il arriva dans
le nord-est de la Perse. Non sans quelques difficultés supplémentaires, il gagna Téhéran. Il accepta
de s’occuper des chevaux de course d’un riche dentiste, fréquenta l’hippodrome et fit d’amusantes
caricatures des personnalités qui le fréquentaient.
Parallèlement, il se passionna pour la technique mé diévale de la miniature persane et en apprit les
secrets auprès d’un vieux maître. Très vite, il acquit une notoriété dans cet art tombé en déshérence.
De plus, ses qualités de portraitiste lui valurent de nombreuses com mandes dans la haute société
indigène et étrangère.
En juillet 1925 naquit ma demi-sœur Elisabeth. Lors de son baptême dans l’église orthodoxe russe
Saint-Nicolas de Téhéran, elle eut pour parrain l’attaché militaire allemand, le comte Friedrich-
Werner von der Schulenburg, celui-là même qui deviendra ambassadeur du Reich à Moscou au
moment du pacte germano-soviétique.
En 1926, Mak est recommandé auprès du nouveau Shah de Perse, Rezah Shah Pahlevi, par Sir Percy
Loraine, ministre plénipotentiaire anglais. Il fit du monarque un portrait monumental de 14 m2 (ce
portrait, qui se trouvait dans le palais du Golestan à Téhéran, a disparu depuis la chute des Palhevi).
En 1927 lui fut accordé le titre de peintre officiel de la Cour.
Au mois de septembre de la même année, vu son statut d’apatride, il fut honoré de la nationalité
iranienne sous le nom Mak. Suite à une erreur de transcription en langue persane, son nom fut
orthographié Mack dans la patente lui accordant sa nouvelle nationalité. Etant la seule pièce d’iden-
tité établie en bonne et due forme depuis son exil de Russie, cette patente devint pour le restant de
sa vie un document de référence. Il ne fut donc pas étonnant qu’en France et en Belgique son nom
ait été orthographié Mack sur tous les documents administratifs.
Dans sa correspondance privée et dans l’exercice de son art, mon père a toujours signé Paul Mak.
Sauf exception, les catalogues d’exposition et les articles de presse se référèrent toujours à l’ortho-
graphe de la signature présente dans ses œuvres.
Entre la fin des années 20 et le début des années 30, Mak fit des expositions en Iran, en Egypte, en
Grèce, en France et en Angleterre, ou plus exactement, à Téhéran (1926), au Caire (1928 et 1930), à
Athènes (1931), à Paris (1928-1929, 1932) et à Londres (1928 et 1933).
Grand amateur de courses de chevaux, il fréquenta assidûment les hippodromes dans toutes les villes
où il exposa: partout il perdit, sans état d’âme, de grosses sommes d’argent.
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